Ce document est issu d’un travail réalisé dans le cadre du programme du contrôle qualité et de gestion des nappes souterraines de Gironde, programme financé à 80 % par le Conseil Général de Gironde (avec le soutien financier de l’Agence de l’Eau Adour-Garonne) et à 20 % par le BRGM.
Sommaire de l’article :
- I. Contexte Général
- II. Bilan des prélèvements 2009
- III. Bilan des suivis piézométriques
- IV. Bilan du suivi qualité
I. CONTEXTE GENERAL
Le département de la Gironde se caractérise par la présence d’importantes réserves en eaux souterraines. Il fait aussi partie des départements où les nappes profondes sont les plus exploitées (165 millions de m3 prélevés dans les nappes dont 130,3 millions dans les nappes profondes en 2009).
Le suivi piézométrique des nappes a débuté en 1958 sur la nappe de l’Eocène et a progressivement été étendu aux 5 grands autres systèmes aquifères du département (Jurassique, Crétacé supérieur, Oligocène, Miocène et Plio-Quaternaire). Les données acquises au cours de ces cinquante dernières années ont permis d’initier des études visant à mieux connaître le comportement des aquifères (ex : modélisation des aquifères du bassin nord aquitain), de mettre en évidence la surexploitation de certains d’entre eux et de délimiter les secteurs les plus sensibles. Parallèlement, le contrôle de la qualité des eaux souterraines a débuté en 1990 avec pour objectifs, l’identification des aquifères les plus vulnérables et la mise en évidence d’une éventuelle dégradation des ressources.
Au-delà de la volonté départementale de mieux connaître les ressources souterraines, le SAGE « Nappes profondes de Gironde », approuvé par l’arrêté préfectoral du 25 novembre 2003, est né de ces missions de suivi. Ces dernières s’inscrivent aussi dans le cadre plus large de la Directive Cadre Européenne sur l’Eau (DCE) du 23 octobre 2000 qui fixe aux états membres de l’Union Européenne des objectifs de reconquête de la qualité de l’eau et des milieux aquatiques d’ici 2015 et préconise, pour ce faire, des procédures de surveillance quantitative et qualitative des masses d’eau.
Depuis 2008, le suivi quantitatif des points dits « RCS » est sous la maîtrise d’ouvrage de l’ONEMA (Office National de l’Eau et des Milieux Aquatiques). Le suivi piézométrique des points départementaux ainsi que le suivi qualitatif de l’ensemble des points de contrôle est, quant à lui, cofinancé à hauteur de 80 % par le Conseil Général (avec le soutien financier de l’Agence de l’Eau Adour-Garonne) et à hauteur de 20 % par le BRGM qui assure les missions techniques.
En 2009, ces dernières ont consisté à collecter les informations relatives aux prélèvements (quantité + qualité), à suivre l’évolution des niveaux et de la qualité des 6 grands systèmes aquifères du département et à valoriser les données quantitatives et qualitatives recueillies. A noter qu’une partie du financement CG33/BRGM a été consacrée à l’achat de nouveaux télétransmetteurs de façon à finaliser la modernisation du réseau entreprise en 2008.
La poursuite de l’acquisition des données vise à fournir les éléments de connaissance nécessaires au tableau de bord des SAGE, à la gestion des prélèvements (en permettant, entre autres, une actualisation des Volumes Maximums Prélevables Objectif - VMPO - définis dans le SAGE « Nappes profondes de Gironde »), à l’évaluation des ressources potentielles et au diagnostic de l’état des nappes , afin de répondre aux exigences de la DCE.
II. BILAN DES PRELEVEMENTS 2009
En 2009, les volumes retenus au sens des VMPO (prélèvements effectués dans les nappes du Plio-Quaternaire, de l’Oligocène de l’Entre-deux-Mers, de la base du Crétacé supérieur et du Jurassique exclus) ont atteint 127,6 millions de m3. La répartition par aquifère est la suivante :
- 8,84 Mm3 prélevés dans les nappes du Miocène, soit 6,9 % des volumes totaux,
- 54,9 Mm3 prélevés dans la nappe de l’Oligocène, soit 43,0 % des volumes totaux,
- 60,1 Mm3 prélevés dans les nappes de l’Eocène, soit 47,1 % des volumes totaux,
- 3,72 Mm3 prélevés dans la nappe du sommet du Crétacé supérieur, soit 2,9 % des volumes totaux.
Par rapport à 2008, ces prélèvements ont diminué de 7,79* Mm3 (soit - 46,9 %) dans les nappes du Miocène et de 7,91* Mm3 (soit - 12,6 %) dans la nappe de l’Oligocène et augmenté de 1,04* Mm3 (soit + 1,8 %) dans les nappes de l’Eocène et de 0,36* Mm3 (soit + 10,8 %) dans la nappe du sommet du Crétacé supérieur.
* : valeurs calculées à partir des volumes 2009 et des volumes 2008 réactualisés (réaffectations de nappe possibles et prise en compte des volumes déclarés tardivement)
Dans leur ensemble, les prélèvements retenus au sens des VMPO ont diminué de 14,3* Mm3 (- 10,1 %).
Le tableau et le graphique suivants (Fig.1) permettent de visualiser les différences entre les volumes prélevés en 2009 et les VMPO définis pour chaque unité de gestion du SAGE ainsi que l’évolution de ces écarts par aquifère depuis l’approbation du SAGE « Nappes Profondes de Gironde » en 2003.
Il apparaît qu’en 2009, la nappe de l’Eocène (VMPO = 44,5 Mm3/an à l’horizon 2013) est restée déficitaire, en particulier sur la zone Centre. Depuis 3 ans, l’écart entre les volumes prélevés et le VMPO tend toutefois à se stabiliser autour de 15 millions de m3 alors qu’il atteignait 25 millions de m3 en 2003. Les autres nappes sont excédentaires.
Depuis 7 ans, il apparaît donc que la gestion active des ressources et la mise en œuvre de mesures visant à économiser l’eau ont permis de réduire le déficit de la nappe éocène en zone Centre. Ce dernier reste toutefois important et peut donc potentiellement être encore réduit.
III. BILAN DES SUIVIS PIEZOMETRIQUES
Le réseau de suivi mis en place en 1958 sur la nappe des « Sables de l’Eocène inférieur à moyen » a progressivement été étendu aux 6 grands systèmes aquifères du département. En 2009, les 182 forages objets d’un suivi continu, mensuel ou trimestriel dans le cadre des programmes « Contrôle qualité et gestion des nappes d’eaux souterraines en Gironde » et « Suivi ONEMA » (points RCS) sont représentés sur la figure 2.
Les niveaux piézométriques mesurés sur ces forages ainsi que sur les ouvrages dits « annuels » (235 mesures réalisées en 2009) ont permis d’établir des cartes piézométriques pour chaque aquifère .
La carte établie pour l’aquifère de l’Eocène inférieur à moyen en 2009 a été comparée à celles établies en 2003 (année de l’approbation du SAGE) et 2008 (année précédente).
La figure 3 permet de noter une évolution nette entre 2003 et 2008 avec la jonction des 2 zones où l’altitude de la piézométrie est comprise entre 0 et - 5 m NGF, la progression de cette même zone vers le sud-est et une augmentation de la superficie de la zone où la piézométrie est inférieure à - 25 m NGF.
Entre 2008 et 2009, les variations sont moins importantes. On note toutefois une légère augmentation de la superficie des courbes - 10 à - 25 m NGF en direction de l’est et du sud-est, la réapparition de l’isopièze – 30 m NGF au sud de Bordeaux (secteur de Martillac) disparue en 2008 et surtout, l’apparition pour la première fois, de l’isopièze - 35 m NGF sous Martillac.
L’apparition de cette isopièze s’explique en fait par l’augmentation des prélèvements effectués par la CUB dans ce secteur suite à la pollution de la source de Gamarde (Oligocène) à Saint-Médard-en-Jalles.
- Fig.3 : Evolution de la piézométrie de la nappe de l’Eocène inférieur à moyen entre 2003 et 2009
Pour les autres nappes , les cartes établies avec les mesures réalisées en 2009 mettent en évidence :
- la persistance d’une dépression piézométrique (principalement due aux pompages effectués dans la nappe sus-jacente de l’Eocène inférieur à moyen) à l’aplomb de Bordeaux pour la nappe du Crétacé supérieur. On note toutefois une stabilisation des isopièzes 0, - 5, - 10 et - 15 m NGF au droit de l’agglomération bordelaise ;
- une légère évolution des isopièzes relatives à la nappe de l’Oligocène dans la zone littorale (nord du Bassin d’Arcachon) et dans la région bordelaise (observation de légères baisses au nord-ouest de l’agglomération et de légères remontées plus au sud). Au niveau de la ligne des 100 000 m3/jour (axe Léognan/Saucats), les isopièzes - 2,5 à + 5 m NGF se sont aussi resserrées en raison d’une remontée de la piézométrie à l’amont ;
- une situation piézométrique semblable à celle de 2008 pour l’aquifère du Miocène inférieur (Aquitanien) (indication d’une stabilité des prélèvements qui va à l’encontre de la baisse estimée à partir des volumes déclarés).
IV. BILAN DU SUIVI QUALITE
En 2009, le réseau de suivi qualitatif était constitué de 36 ouvrages patrimoniaux dits « RCS » et de 16 ouvrages départementaux implantés dans le domaine minéralisé de l’Eocène et la partie vulnérable de l’Oligocène (cf. fig. 4).
Les analyses réalisées depuis 1990 (sur certains points) ont permis de définir les caractéristiques géochimiques de chaque nappe et de mettre en évidence des disparités entre aquifères . Il apparaît ainsi :
- que la nappe de l’Eocène inférieur à moyen du domaine minéralisé est la seule à présenter une conductivité moyenne supérieure à 1000 µS/cm [1],
- que toutes les nappes , à l’exception de celles de l’Eocène supérieur et de l’Oligocène vulnérable, présentent une teneur moyenne en fer supérieure à 0,2 mg/l [1],
- que seules les nappes du Secondaire et de l’Eocène inférieur à moyen du domaine minéralisé présentent des teneurs moyennes en fluor supérieures à 1,5 mg/l [2].
- Fig. 4 : Réseau qualité 2009
Pour les nitrates, l’examen des analyses effectuées entre 2004 et 2009 montre que le nombre de détections varie selon les années mais ne présente pas de tendance marquée à la baisse ou à la hausse. Sur cette même période, l’aquifère présentant la teneur moyenne la plus forte correspond à l’Oligocène vulnérable (17,8 mg/l contre 12,9 mg/l pour le Plio-Quaternaire). Il est à noter que cette dernière valeur a été calculée sans tenir compte des teneurs très élevées (comprises entre 108 et 198 mg/l) du forage des Grangeaux à Saint-Avit-Saint-Nazaire (08058X0092) intégré en 2009 en remplacement du forage de Vidasse à Pessac-sur-Dordogne (08055X0003) et que les résultats obtenus ne sont pas forcément représentatifs de l’ensemble des réservoirs.
Enfin, le dosage systématique en 2009 des pesticides et des composés inscrits sur les listes de l’Agence de l’Eau (avec distinction de l’environnement agricole ou urbain) a permis de mettre en évidence les molécules suivantes :
- Fig.5 : Nombre de points de contrôle ayant présenté des teneurs supérieures aux limites de détection (analyses 2009)
Il est à noter que 4 ouvrages dits « PZEM » destinés à suivre la qualité des eaux de l’Eocène à proximité de l’estuaire de la Gironde ont été abandonnés entre 2008 et 2009 (passage de 25 à 21 points). Il apparaît aussi, comme chaque année, que l’Oligocène est l’aquifère qui s’est caractérisé par la plus haute fréquence de détection (2,43 molécules par point contre 1,44 pour le Plio-Quaternaire) (taux respectifs de 2,71 et 1,44 en 2008). On peut aussi mentionner que certaines teneurs dosées en 2009 (atrazine déisopropyl, atrazine déséthyl, simazine, terbuthylazine déséthyl, chloroforme et tétrachloroéthène) ont été supérieures aux limites de qualité des eaux destinées à la consommation humaine.