Ce document est issu d’un travail réalisé dans le cadre du programme du contrôle qualité et de gestion des nappes souterraines de Gironde.
Sommaire de l’article :
- I. Contexte général
- II. Bilan des prélèvements 2012
- III. Bilan des suivis piézométriques
- IV. Bilan du suivi qualité
I. Contexte général
Le département de la Gironde se caractérise par la présence d’importantes réserves en eaux souterraines. Il fait aussi partie des départements où les nappes profondes sont les plus exploitées (217,2 millions de m3 prélevés dans les eaux souterraines, dont 140,5 millions de m3 dans les nappes profondes en 2012).
Le suivi piézométrique des nappes a débuté en 1958 sur la nappe de l’Eocène et a progressivement été étendu aux 5 grands autres systèmes aquifères du département (Jurassique, Crétacé supérieur, Oligocène, Miocène et Plio-Quaternaire). Les données acquises au cours de ces cinquante dernières années ont permis d’initier des études visant à mieux connaître le comportement des aquifères (ex : modélisation des aquifères du bassin nord aquitain), de mettre en évidence la surexploitation de certains d’entre eux et de délimiter les secteurs les plus sensibles. Parallèlement, le contrôle de la qualité des eaux souterraines a débuté en 1990 avec pour objectifs, l’identification des aquifères les plus vulnérables et la mise en évidence d’une éventuelle dégradation des ressources.
Au-delà de la volonté départementale de mieux connaître les ressources souterraines, le SAGE [1] « Nappes profondes de Gironde », approuvé par l’arrêté préfectoral du 25 novembre 2003 et révisé le 18 juin 2013, est né de ces missions de suivi. Elles s’inscrivent aussi dans les préconisations de la Directive Cadre européenne sur l’Eau (DCE) du 23 octobre 2000, qui fixe aux états membres de l’Union Européenne des objectifs de reconquête de la qualité de l’eau et des milieux aquatiques d’ici 2015, en établissant des procédures de surveillance quantitative et qualitative des masses d’eau.
Depuis 2008, le suivi quantitatif des points, dits « RCS » (Réseau de Contrôle de Surveillance), est sous la maîtrise d’ouvrage de l’ONEMA (Office National de l’Eau et des Milieux Aquatiques). Le suivi piézométrique des points départementaux (dits « RCD ») ainsi que le suivi qualitatif de l’ensemble des points de contrôle est, quant à lui, cofinancé à hauteur de 80 % par le Conseil Général (avec le soutien financier de l’Agence de l’Eau Adour-Garonne) et à hauteur de 20 % par le BRGM qui assure les missions techniques.
En 2012, ces missions ont consisté à collecter les informations relatives aux prélèvements (quantité + qualité), à suivre l’évolution des niveaux et de la qualité des 6 grands systèmes aquifères du département et à valoriser les données quantitatives et qualitatives recueillies.
La poursuite de l’acquisition des données vise à fournir les éléments de connaissance nécessaires au tableau de bord du SAGE, à la gestion des prélèvements, à l’évaluation des ressources potentielles et au diagnostic de l’état des nappes , afin de répondre aux exigences de la DCE.
II. Bilan des Prélèvements 2012
En 2012, les volumes retenus au sens des VMPO (prélèvements effectués dans les nappes du Plio-Quaternaire, de l’Oligocène de l’Entre-deux-Mers et du Jurassique exclus) ont atteint 139,6 millions de m3 (baisse de 0,47 % par rapport à 2011). La répartition par aquifère est la suivante (Tabl. 1) :
- Tabl. 1 : Volumes prélevés en 2012 et écarts par rapport à 2011 ©Conseil Général de la Gironde & ©BRGM Aquitaine - 2014
Dans le cadre de la révision du SAGE, de nouveaux VMPO ont été calculés pour tenir compte de l’avancée des connaissances sur les aquifères . Les nouveaux VMPO, mentionnés dans le PAGD [2] de la ressource, approuvé par la CLE [3] en mars 2012, tiennent désormais compte de la nappe de la base du Crétacé supérieur et font la distinction entre Eocène supérieur et Eocène inférieur à moyen, sur les zones géographiques Médoc-Estuaire, Littoral et Nord. Le VMPO global a été fixé à 202,9 Mm3, soit 47,9 Mm3 de plus que la valeur précédente. Le tableau et le graphique suivants (Fig.1) permettent de visualiser les différences entre les volumes prélevés en 2012 et les différents VMPO du SAGE révisé.
Remarque : Les unités de gestion (UG) où les VMPO n’ont pas été définis correspondent aux zones où l’aquifère est discontinu ou trop profond pour être exploité
- Fig. 1 : Ecarts entre les volumes prélevés en 2012 et les nouveaux VMPO ©Conseil Général de la Gironde & ©BRGM Aquitaine - 2014
Il apparaît que, seuls les prélèvements effectués dans la nappe de l’Eocène au droit de la zone géographique Centre et dans la nappe de l’Eocène inférieur à moyen au droit de la zone géographique Littoral, ont été supérieurs aux VMPO (respectivement fixés à 38,3 et 4,8 Mm3/an). Les prélèvements effectués dans la nappe de l’Oligocène au droit de la zone Centre ont quant à eux été inférieurs de 3,85 Mm3 par rapport au VMPO (fixé à 48 Mm3/an). En 2012 comme en 2011, l’existence de problèmes qualitatifs sur des ressources oligocènes majeures de la zone Centre utilisées pour l’AEP a impliqué le transfert temporaire des prélèvements sur la nappe de l’Eocène.
III. Bilan des suivis piézométriques
Le réseau de suivi mis en place en 1958 sur la nappe de l’Eocène inférieur à moyen a progressivement été étendu aux 5 autres grands systèmes aquifères du département. En 2012, le suivi piézométrique réalisé par le BRGM a porté sur 71 ouvrages dits « RCS » et 136 ouvrages dits « RCD ». Ces 207 points ont fait l’objet d’un suivi continu, mensuel ou trimestriel et ont été représentés sur la figure 2. En complément, 251 mesures ont été réalisées sur des points dits « annuels ».
Depuis 2010, les cartes piézométriques sont établies au moyen des méthodes géostatistiques (krigeage avec dérive externe) validées dans le cadre du module 2 de la convention « Eaux souterraines » passée entre l’Etat, le BRGM et la Région Aquitaine avec le soutien financier de l’Agence de l’Eau Adour-Garonne.
Pour chaque aquifère profond étudié, la méthode a consisté à sélectionner les données, à les préparer, à les vérifier et à les traiter. Dans tous les cas, la dérive externe utilisée correspond à la piézométrie issue du modèle Modèle Nord-Aquitain (MONA) de l’année n-2 (soit 2010 pour établir les cartes 2012).
Pour chacune des nappes précédemment citées, une carte piézométrique ainsi qu’une carte d’indice de confiance (écart-type des valeurs interpolées) ont pu être obtenues.
Dans le cas de l’Eocène inférieur à moyen, de l’Oligocène et du Miocène, une troisième carte représentant les écarts entre 2012 et 2011 a aussi pu être tracée.
- Fig. 3 : Carte piézométrique 2012 et carte des différences 2012-2011 pour la nappe de l’Eocène inférieur à moyen ©Conseil Général de la Gironde & ©BRGM Aquitaine - 2014
La figure 3 représente la carte piézométrique et la carte des différences obtenues pour la nappe de l’Eocène inférieur à moyen. La prédominance d’une couleur vert clair sur la carte des différences montre que les niveaux ont enregistré des baisses comprises entre 0 et 1 m sur la majeure partie du territoire (1,02 m en moyenne). Au sud de Bordeaux, les teintes bleutés qui s’organisent en cercles concentriques indiquent une évolution très à la baisse des niveaux piézométriques (baisse maximale d’environ 10 m, centrée sur le secteur de Martillac engendrant des niveaux inférieurs à - 35 m NGF) en lien direct avec le report exceptionnel des prélèvements à l’Eocène en raison de l’indisponibilité de certaines ressources oligocènes de l’ouest bordelais (contamination par des perchlorates).
En ce qui concerne les autres nappes , on a observé des hausses moyennes respectives de 4 et 16 cm sur les aquifères de l’Oligocène et du Miocène ; une certaine stabilité, voire une légère hausse des niveaux de l’aquifère de la base du Crétacé supérieur et une baisse des niveaux de l’aquifère sus-jacent (sommet du Crétacé supérieur) en lien probable avec la forte augmentation des prélèvements opérés dans le réservoir de l’Eocène inférieur à moyen. Pour plus de détails, le lecteur pourra se référer au rapport BRGM/RP-63375-FR.
IV. Bilan du suivi qualité
En 2012, le réseau de suivi qualitatif était constitué de 36 ouvrages dits « RCS » et de 16 ouvrages dits « RCD » implantés dans le domaine minéralisé de l’Eocène, la partie vulnérable de l’Oligocène ou l’Estuaire (Fig. 4).
Le calcul des teneurs moyennes des différentes masses d’eaux souterraines (sur la base des résultats obtenus en 2012 sur les points RCS, RCD et les captages d’eau potable contrôlés par l’ARS [4]) a permis de mettre en évidence un certain nombre de teneurs supérieures aux exigences de qualité règlementaires fixées pour les eaux souterraines brutes ou les eaux destinées à la consommation humaine.
La plupart des aquifères de Gironde présentent des teneurs en fer supérieures à 200 µg/l. Les anomalies en manganèse (teneurs supérieures à 50 µg/l) sont aussi fréquentes. Ces anomalies concernent respectivement 12 et 3 masses d’eau sur 20.
La base du Crétacé supérieur et les alluvions de la Gironde sont aussi concernées par des anomalies de la conductivité (valeur supérieure à 1100 µS/cm) qui peuvent s’accompagner d’anomalies en chlorures et/ou sodium (teneurs supérieures à 200 mg/l). Certaines masses d’eau peuvent enfin être concernées par des anomalies en fluor (base et sommet du Crétacé supérieur) ou en nitrates (alluvions de la Dordogne) mais elles sont plus rares.
En ce qui concerne les micropolluants organiques, il apparaît qu’aucun pesticide, ni HAP, ni COV n’a été détecté dans les eaux du Crétacé en 2012. Dans le cas des nappes sus-jacentes (Eocène pour la première fois, Oligocène, Miocène et Plio-Quaternaire), 25 points sur 124 ont été concernés par la présence de pesticides, 11 points sur 125 par la présence de COHV et 12 points sur 103 par la présence de HAP. Le tableau 2 fait état des molécules quantifiées par l’ARS et le BRGM, organismes en charge du suivi qualitatif en Gironde (double suivi sur certains points captant la nappe de l’Oligocène).
- Tabl. 2 : Nombre de points de contrôle ayant présenté des teneurs supérieures aux limites de quantification en 2012 (NR = non recherché) ©Conseil Général de la Gironde & ©BRGM Aquitaine - 2014
Il apparaît que ce sont les produits de dégradation de l’atrazine qui ont été le plus souvent quantifiés en 2012 sur les points suivis par le BRGM. Sur ces mêmes points, le nombre de détection de pesticides a été plus fort sur les ouvrages sollicitant les formations oligocènes (22 molécules sur 10 points - 24 en 2011) que sur les ouvrages sollicitant les formations plio-quaternaires (10 molécules sur 9 points - 13 en 2011).