Ce document est issu d’un travail réalisé dans le cadre du programme du contrôle qualité et de gestion des nappes souterraines de Gironde, programme financé à 80 % par le Conseil Général de Gironde (avec le soutien financier de l’Agence de l’Eau Adour-Garonne) et à 20 % par le BRGM.
Sommaire de l’article :
- I. Contexte Général
- II. Bilan des prélèvements 2010
- III. Bilan des suivis piézométriques
- IV. Bilan du suivi qualité
I. CONTEXTE GENERAL
Le département de la Gironde se caractérise par la présence d’importantes réserves en eaux souterraines. Il fait aussi partie des départements où les nappes profondes sont les plus exploitées (211,4 millions de m3 prélevés dans les nappes dont 137,1 millions dans les nappes profondes en 2010).
Le suivi piézométrique des nappes a débuté en 1958 sur la nappe de l’Eocène et a progressivement été étendu aux 5 grands autres systèmes aquifères du département (Jurassique, Crétacé supérieur, Oligocène, Miocène et Plio-Quaternaire). Les données acquises au cours de ces cinquante dernières années ont permis d’initier des études visant à mieux connaître le comportement des aquifères (ex : modélisation des aquifères du bassin nord aquitain), de mettre en évidence la surexploitation de certains d’entre eux et de délimiter les secteurs les plus sensibles. Parallèlement, le contrôle de la qualité des eaux souterraines a débuté en 1990 avec pour objectifs, l’identification des aquifères les plus vulnérables et la mise en évidence d’une éventuelle dégradation des ressources.
Au-delà de la volonté départementale de mieux connaître les ressources souterraines, le SAGE « Nappes profondes de Gironde », approuvé par l’arrêté préfectoral du 25 novembre 2003, est né de ces missions de suivi. Ces dernières s’inscrivent aussi dans le cadre plus large de la Directive Cadre européenne sur l’Eau (DCE) du 23 octobre 2000 qui fixe aux états membres de l’Union Européenne des objectifs de reconquête de la qualité de l’eau et des milieux aquatiques d’ici 2015 et préconise, pour ce faire, des procédures de surveillance quantitative et qualitative des masses d’eau.
Depuis 2008, le suivi quantitatif des points dits « RCS » est sous la maîtrise d’ouvrage de l’ONEMA (Office National de l’Eau et des Milieux Aquatiques). Le suivi piézométrique des points départementaux ainsi que le suivi qualitatif de l’ensemble des points de contrôle est, quant à lui, cofinancé à hauteur de 80 % par le Conseil Général (avec le soutien financier de l’Agence de l’Eau Adour-Garonne) et à hauteur de 20 % par le BRGM qui assure les missions techniques.
En 2010, ces missions ont consisté à collecter les informations relatives aux prélèvements (quantité + qualité), à suivre l’évolution des niveaux et de la qualité des 6 grands systèmes aquifères du département et à valoriser les données quantitatives et qualitatives recueillies.
La poursuite de l’acquisition des données vise à fournir les éléments de connaissance nécessaires au tableau de bord des SAGE, à la gestion des prélèvements (en permettant, entre autres, une actualisation des Volumes Maximums Prélevables Objectif - VMPO - définis dans le SAGE « Nappes profondes de Gironde »), à l’évaluation des ressources potentielles et au diagnostic de l’état des nappes , afin de répondre aux exigences de la DCE.
II. BILAN DES PRELEVEMENTS 2010
En 2010, les volumes retenus au sens des VMPO (prélèvements effectués dans les nappes du Plio-Quaternaire, de l’Oligocène de l’Entre-deux-Mers, de la base du Crétacé supérieur et du Jurassique exclus) ont atteint 134,1 millions de m3. La répartition par aquifère est la suivante (Tableau 1) :
* : valeurs calculées à partir des volumes 2010 et des volumes 2009 réactualisés (réaffectations de nappe possibles et prise en compte des volumes déclarés tardivement)
Le tableau et le graphique suivants (Figure 1) permettent de visualiser les différences entre les volumes prélevés en 2010 et les VMPO définis pour chaque unité de gestion du SAGE ainsi que l’évolution de ces écarts par aquifère depuis l’approbation du SAGE « Nappes Profondes de Gironde » en 2003.
Il apparaît qu’en 2010, la nappe de l’Eocène (VMPO = 44,5 Mm3/an à l’horizon 2013) est restée déficitaire, en particulier sur la zone Centre. Depuis 4 ans, dans la nappe de l’Eocène, l’écart entre les volumes prélevés et le VMPO tend toutefois à se stabiliser autour de 15 millions de m3 alors qu’il atteignait 25 millions de m3 en 2003. Les autres nappes sont excédentaires.
Depuis 8 ans, il apparaît donc que la gestion active des ressources et la mise en œuvre de mesures visant à économiser l’eau ont permis de réduire le déficit de la nappe éocène en zone Centre. Ce dernier reste toutefois important et peut donc potentiellement être encore réduit.
III. BILAN DES SUIVIS PIEZOMETRIQUES
Le réseau de suivi mis en place en 1958 sur la nappe des « Sables de l’Eocène inférieur à moyen » a progressivement été étendu aux 6 grands systèmes aquifères du département. En 2010, les 203 forages objets d’un suivi continu, mensuel ou trimestriel dans le cadre des programmes « Contrôle qualité et gestion des nappes d’eaux souterraines en Gironde » (points RCD) et « Suivi ONEMA » (points RCS) sont représentés sur la figure 2. En complément, 264 mesures ont été réalisées sur des points dits « annuels ».
En 2010, à la suite du module 2 de la convention « Eaux souterraines » passée entre l’Etat, le BRGM et la Région Aquitaine, avec le soutien financier de l’Agence de l’Eau Adour-Garonne, les cartes piézométriques ont été établies au moyen des méthodes géostatistiques (krigeage avec dérive externe).
Pour chaque aquifère étudié (Crétacé, Eocène, Oligocène et Miocène), la méthode a consisté à sélectionner les données, à les préparer, à les vérifier et à les traiter. Dans tous les cas, la dérive externe utilisée correspond à la piézométrie issue du modèle MONA de l’année n-2, soit 2008.
Les résultats obtenus pour la nappe du Crétacé n’ont pas été jugés satisfaisants (données disponibles trop peu nombreuses). Pour cet aquifère , la référence restera donc la carte établie manuellement. Pour les 3 autres nappes , une carte piézométrique ainsi qu’une carte d’indice de confiance (écart-type des valeurs interpolées) ont pu être obtenues.
La figure 3 représente les cartes obtenues pour la nappe de l’Eocène. La première met en évidence un niveau minimal à - 20 m NGF au droit de l’agglomération bordelaise, la présence d’une zone de grande extension où l’altitude de la nappe est inférieure à 0 m NGF et la présence d’un dôme piézométrique dans les environs de Sainte-Hélène. La seconde montre que le sud du département est la zone où les résultats sont le moins fiables (du fait de la faible densité des points de mesure).
Pour les autres nappes , les cartes établies avec les mesures réalisées en 2010 n’ont pas mis en évidence d’évolutions majeures.
Pour la nappe du Crétacé supérieur, on retrouve la dépression piézométrique à - 20 m NGF à l’aplomb de Bordeaux liée aux pompages effectués dans la nappe sus-jacente de l’Eocène inférieur à moyen. On note aussi des remontées ponctuelles assez sensibles dans le secteur du Bassin d’Arcachon et à l’est de Langon.
Pour les nappes de l’Oligocène et du Miocène, le recours au tracé semi-automatique des cartes a eu pour conséquence de faire apparaître des structures (dôme de Sainte-Hélène en particulier) qui n’étaient pas prises en compte dans les cartes manuelles.
IV. BILAN DU SUIVI QUALITE
En 2010, le réseau de suivi qualitatif était constitué de 36 ouvrages patrimoniaux dits « RCS » et de 16 ouvrages départementaux implantés dans le domaine minéralisé de l’Eocène, la partie vulnérable de l’Oligocène ou l’Estuaire (Figure 4).
Les analyses réalisées depuis 1990 (sur certains points) ont permis de définir les caractéristiques géochimiques de chaque nappe et de mettre en évidence des disparités entre aquifères . Il apparaît ainsi :
- que la nappe de l’Eocène inférieur à moyen du domaine minéralisé est la seule à présenter une conductivité moyenne supérieure à 1000 µS/cm*,
- que toutes les nappes présentent une teneur moyenne en fer supérieure à 0,2 mg/l*, celles du Plio-Quaternaire étant les plus chargées,
- que seules les nappes du Secondaire et de l’Eocène inférieur à moyen du domaine minéralisé présentent des teneurs moyennes en fluor supérieures à 1,5 mg/l**.
* : Référence de qualité des eaux destinées à la consommation humaine
** : Limite de qualité des eaux destinées à la consommation humaine
Pour les nitrates, l’examen des analyses effectuées entre 2004 et 2010 montre que le nombre de détections varie selon les années mais ne présente pas de tendance marquée à la baisse ou à la hausse. Sur cette même période, l’aquifère présentant la teneur moyenne la plus forte correspond à l’Oligocène vulnérable (17,6 mg/l contre 8,0 mg/l pour le Plio-Quaternaire). Il est à noter que cette dernière valeur a été calculée sans tenir compte des teneurs très élevées (comprises entre 108 et 282 mg/l) du forage des Grangeaux à Saint-Avit-Saint-Nazaire (08058X0092) intégré en 2009 en remplacement du forage de Vidasse à Pessac-sur-Dordogne (08055X0003) et que les résultats obtenus sur ce point ne sont pas forcément représentatifs de l’ensemble des réservoirs du Plio-Quaternaire.
Enfin, le dosage systématique des molécules de la rubrique 8 de l’Agence de l’Eau lors des campagnes de prélèvements de 2009 et de 2010 sur les 21 points sollicitant une nappe libre a permis de mettre en évidence les molécules organiques suivantes (Tableau 2). Les résultats de la recherche de ces mêmes molécules par l’ARS en 2010 sont reportés dans ce même tableau.
- Tableau 2 : Nombre de points de contrôle ayant présenté des teneurs supérieures aux limites de détection
(*) : sauf indication contraire dans la cellule
Il apparaît que l’Oligocène est l’aquifère qui s’est caractérisé par la plus haute fréquence de détection (2,64 molécules par point contre 1,56 pour le Plio-Quaternaire en 2010) (taux respectifs de 2,43 et 1,44 en 2009).
On peut aussi mentionner que certaines teneurs dosées en 2010 (atrazine, déséthyl atrazine, simazine, déséthyl simazine, terbuthylazine et tétrachloroéthène) ont été supérieures aux limites de qualité des eaux destinées à la consommation humaine.